Lettre aux caïds
Cela nous parait tellement loin,
Voire utopique
Tant la distance s’accroit
De jours en jours,
De crimes en crimes,
De viols en viols,
De corrompus en corrompus.
Cela nous parait si loin
Que nous en rions,
La raillerie est notre arme.
Nous finissons par montrer du doigt
Celles et ceux qui disent
L’avoir atteint
En nous bidonnant
Devant tant de bêtises.
Cela nous donne une force
Qui rassure,
Nous rassure,
Nous conforte dans ce monde
Peut-être idiot
Mais aucun autre n’est possible.
L’enfant se présente
Devant le caïd de la bande
Le regarde en levant la tête.
Le chef est grand, musclé,
Tatoué, Haine-isé
Il penche la tête
Pour regarder l’enfant
L’enfant lève la tête
Pour regarder le caïd.
L’enfant a le visage fermé
Le caïd est souriant.
L’enfant lève la main
Et le touche
Il lui touche le ventre
Lui dit doucement :
La distance est grande
C’est toi qui l’étire
Ce monde et si loin
Car tu en as peur
Peur de perdre tes idées,
Tes acquis
Ta grandeur…
Alors tu l’éloignes ce monde
Mais c’est toi en réalité
Qui t’éloigne
Car ce monde est tellement près
Si tu savais !
Je le touche vois-tu
(Il appuie sa main sur le ventre du caïd)
Ce monde est là-dedans
Il va bien falloir un jour
Que tu le fasses germer ce monde là
Ce beau Monde et si Grand
Ton monde de miradors
Est planté d’illusions
Rien d’autre que des illusions
Le Monde dont le Silence
Clame la valeur
Et la magnificence
Tu ne peux imaginer
Sa beauté
Tu ne peux imaginer
Ce qu’il te fera vivre
Comme joies, découvertes
Et réalités.
Le caïd est surpris
Il lève la tête
Pour regarder ses amis
Le silence est lourd
Dans l’assemblée
L’enfant recule
S’’en va.
Pas un mot,
Personne ne peut le retenir.
Qui peut empêcher
Une graine germée
D’ouvrir sa corolle ?
Même la haine
Qui est comme du ciment
Ne peut retenir
Les racines pour élever
La grandeur du Vivant.
1/3/17