Un jour humanitué
Le dirigeant gère et légifère à divers degrés,
Engoncé dans les gênes de sa gravité.
Le technocrate veut se la péter
En imposant le diamètre
De la cuvette des WC.
Le patron veut palper ses
Plaques et paquets de pognon
Pendant que ses ouvriers,
Enchaînés aux machines bien huilées
Sont le vrai moteur de l’usine
Mais sous-alimenté.
Le mariné aime montrer ses deux cerveaux
Dépassant du T-shirt bien moulé
Et va chez le coiffeur
Dès qu’il a un poil
Qui dépasse des trous de nez.
Il aimerait refiler des tartes
Bien fabriquées
(250 g de Farid – 125 g de Beur)
A des zoulous trop colorés.
Moussah le balayeur
Marmonne une chanson de son village
Qu’il a fui il y a quelques années
Laissant les siens
Tomber sous les atrocités.
Quelque part ou même ailleurs
Sur cette planète à peine bleutée
L’enfant n’a jamais ri,
Ne sait plus pleurer,
Il laisse les mouches
Assaillir sa chétivité,
Deux yeux pleins de lumière
Sur une peau squelettée.
Plus loin que loin,
C’est presque l’aube,
La lumière de la ferme
Vient de s’allumer.
Auguste s’est levé,
Il va s’occuper des bêtes
Qui vont l’accueillir
Comme un enfant
Reçoit ses jouets.
Marie, son épouse
Se lève, prépare le café.
La télé est en panne
Dit-elle !
Viens Marie,
Donne-moi la main
Je vais t’expliquer
La nouvelle actualité.
Ils ont bu leur café,
Mangé des grosses tartines
Avec du beurre de la ferme
Et des confitures de l’année.
Main dans la main
Ils se dirigent vers la rivière
Qui chante dans les fourrés.
Ils s’assoient au bord,
Bras dessus, bras dessous
Osent même un petit bisou,
Et Auguste lui déploie la beauté
Embrassée de leur regard
Auréolée de rose et d’orangé,
De chants d’oiseaux
De murmures d’eau vive
Et de multitudes de petites lumières
Eparpillées dans cet espace offert
Enrichies par les petites larmes
Qu’ils osent offrir
A cette belle matinée.
C’est le crépuscule
Qui vient refermer
Ce jour bien aligné
Dans la ligne de mire
Des horreurs habituées.
A demain
Pour un nouveau chapitre
A calligraphier.
Michel Labeaume.