Sephirot, l’Arbre de Vie
Bercées par la douce brise de l’aube, elles se balancent, elles dansent en chuchotant entre elles les épilogues de rêves encore frais de la nuit, accompagnés de l’Echo des firmaments constellés d’étoiles et de galaxies, tout cela en un sublime opéra orchestré pour le Chant du Silence. Les cimes. Soutenues par le bel orgueil des troncs vénérables, elles sont le pouvoir toucher les nuages, caressées par la lumière et le vent et savent que ce divin privilège elles le doivent aux racines qui, toujours dans l’ombre, préparent pour la canopée les noces de lumière. Les cimes.
Imaginons. Imaginons l’arbre penser, agir comme l’être humain. Être la cime pénétrée d’infatuation et d’arrogance car elle touche le Ciel. Alors que le peuple des racines voué à une éternité de soumissions, comme s’il méritait ce qu’il vit, n’a qu’à bien se tenir. Être sage et nourrir. Obéissant. D’illusions en illusions, voilà nos cimes mettant en exergue durant leurs conciliabules lourds et sournois, ce besoin de plus en plus flagrant de se détacher des racines tant elles sont le Pouvoir et la hauteur de leur trône ne souffrant d’aucune critique, prise si besoin était comme un blasphème méritant un châtiment à la mesure de l’outrage. Quand les cimes se voient comme un Monde à part…
Imaginons. Imaginons le Ciel ayant eu vent de ces offenses proférées par les cimes dans le secret le plus profond des nuits sans lune. Vous voulez vous détacher du peuple des racines ? Eh bien je vous offre votre liberté, votre indépendance. Et la tempête surgit de l’horizon, gobant l’aurore comme on écrase une fourmi, se rue sur les arbres aux cimes corrompues. C’est le chaos ! Pas une cime n’y échappera. Toutes sont arrachées par la force destructrice de l’ouragan. On en retrouvera à plusieurs kilomètres, gisant, piteuses, dans un champ, leur plaie béante à la merci des curieux (une fois le calme revenu) et des buses continuant tranquillement leur quête de proies en profitant de ces nouveaux perchoirs.
Pendant ce temps, dans la forêt ravagée, nos racines continuent leur œuvre oubliant l’ostracisme idiot des cimes qui se croyaient supérieures tout en affichant une outrecuidance destructrice. Au fil des jours, au fil des semaines, des bourgeons apparaissent, les nouvelles branches vont suivre. Certains arbres seront abattus, trop endommagés. Mais au fil du temps, la nouvelle canopée gardera en elle, comme un devoir de mémoire, la punition infligée aux cimes par trop majestueuses et s’efforcera de rester unie avec les racines qui, au-delà de la bienveillance, sauront toujours agir comme il se doit (aimer)afin de traverser au mieux les épreuves. Unie avec les branches auréolées de vert au renouveau du printemps accueillant le nid si fragile qui va offrir de quoi perdurer la vie.
Attention hommes de pouvoir, le ciel n’est pas toujours bleu.
Michel Labeaume