Nous ne sommes propriétaires que de notre âme.
Vous vous imaginez avoir réussi. Placé aux plus hauts niveaux de la société, vous avez l’orgueil du dirigeant, de celui qui a sous ses ordres une foultitude de gens toisés parfois avec un léger mépris tant votre trône vous brûle le regard. Avant de continuer, je tiens à vous préciser que si mes propos vous semblent dits sur le ton de la colère, vous vous méprenez, je ne suis que le doigt qui désigne, qui appuie à l’endroit du Cœur, l’Anahata. Le pouvoir dont vous faites montre parfois à la télévision, arborant un visage sérieux au possible, un bronzage dernier cri, est le pire des pièges dans lequel vous avez trébuché. Certes, vous ne conduisez pas, vous avez un chauffeur, deux ou trois résidences secondaires et tous les samedis soir pris à savourer les petits fours d’untel quand ce n’est pas le thé après le golf du dimanche après-midi. Quelle classe ! Un peu de chance en plus et vous entrerez dans le Panthéon des grands, votre chef sculpté dans le marbre reposant sur une colonne fleurie de lauriers. Qu’un serveur, lors d’un de ces galas dont vous vous sentez l’indispensable présent, vous tende le plateau et vous voilà à saisir la coupe délicieuse sans même un regard pour ce domestique, le cul coincé dans son uniforme. La vie, monsieur le Président-Directeur-Général, monsieur l’opulent autocrate, monsieur le satrape saisissant de suffisance, n’est pas une course effrénée à la réussite matérielle ou autre. N’est pas une lutte acharnée pour posséder une Mercedes G65 AMG dans son garage ou une Rolex au poignet. N’est pas une lutte acharnée pour faire partie du club très fermé des élites appartenant au « Siècle ». Qui plus est, achetez-vous tout ce qui vous plait, tout ce qui sied à votre ego surdimensionné, vous n’en serez, des ces biens pauvrement matériels, que le piteux locataire, vous et tous vos coreligionnaires. La vieillesse, monsieur le Dominant, n’est qu’un miroir face auquel vous devrez être confronté et il vous en faudra du courage pour vous y oser, à cet affrontement inéluctable. La Vie, monsieur le Dominant, c’est attendre le bus assis à côté d’autres gens et entamer une conversation qui va finir dans de grands éclats de rires. C’est une pièce, ou même un billet, donné au SDF du coin, tout en le regardant avec un sourire. C’est accueillir dans ses bras le migrant qui vous annonce qu’il peut rester en France, il a les papiers qu’il faut. Il en a connu des souffrances, inimaginables. La vie, c’est plus écouter le Silence que faire la Une en vociférant. C’est marcher sous une voute de frondaisons verdoyantes traversées par des rayons incroyablement beaux et à en pleurer de joie tout en écartant les bras au Ciel et crier Merci ! La vie, c’est accueillir un ami qui se cherche, qui voit sa voie et ne sait pas trop comment l’aborder. C’est offrir, c’est donner. La vie c’est faire fi des dogmes, des morales, des miradors, tous ces jeux de maux laids qui entravent les marches et empêchent l’âme d’évoluer. La vie c’est chercher l’humain derrière celui qui ne l’est plus. Qui vit une existence de totales illusions. Et lui tendre la main. Cela peut être vous. Mais avant toute chose, oubliez ce pouvoir. L’Ombre en devient obèse tant elle s’en goinfre. Et enfin libéré, vous pourrez…
4 janvier 2018
M.L.