Louise Michel, Lucie Baud
Mais où donc avez-vous été puisé ce pouvoir, cette folie de dominer, d’écraser, de mépriser ? Mais quand donnerez-vous un peu d’attention au murmure de votre âme vous soufflant l’éclat d’un nouveau bourgeon ? Au lieu de cela, vous l’écrasez du pied, comme on écrase un insecte, l’enfouissant dans le compost de vos esprits. Voyez-vous, mesdames et messieurs les dominants, vous ignorez totalement que le mépris affiché sur vos faciès est en prime adressé à votre âme. Vous ignorez totalement la vie, vous contentant d’amasser, d’ordonner, d’écraser continuellement et tentant maladroitement d’édulcorer vos actes avec une langue de bois apprise dans les couloirs de vos hautes écoles. J’ai souvenance d’avoir toujours vécu avec le peuple et Dieu me garde d’être des vôtres dans une éventuelle autre existence. L’aveugle qui donne a le cœur au-delà des montagnes, et le regard au-delà des horizons. Celui qui refuse de voir a l’ego chevillé au corps et le poids de son être écrase son existence propre. L’utopie ne sera jamais du côté du Verbe aimer. L’utopie est de ne pas voir vos croissance, PIB, développement comme des armes-boucliers pourrissant la terre de nos enfants. L’utopie est de vous croire dans une juste raison alors que ce ne sont que vos propres déraisons qui gouvernent cette lamentable réalité. Je n’ai jamais été plus heureux qu’au milieu des ouvriers (ou alors peut-être dans le Silence). Les anonymes, les prolétaires, les moins-que-rien sont un tout dont vous devriez non gommer les cris mais lire entre leurs maux afin de panser vos lourdeurs qui vous accablent. Une femme a ceci de supérieur à l’homme : elle donne la vie. Vous donnez la mort. Sur la blanche écume, l’oiseau fatigué rejoint la grève où il reste inanimé, si las de tant de tempêtes. Il dormira ainsi quelque temps, immobile, laissé là, abandonné à une lumière éternité le berçant d’amour. Comment pouvez-vous à ce point ignorer l’autre possible ! Sont-ce les érections de vos personnalités grotesques qui vous rendent ainsi sourds et ignorants ? L’autre possible, je vais vous le dire eh bien vous y avez droit vous aussi, qui que vous soyez, dictateur, politicien imbu, corrompu, avide de grandeur et assoiffé de pouvoir, vous y avez tous droit. Il vous suffit simplement de dire oui. Ô me diront certains, l’Humanité n’est pas prête ! l’enfant a quitté la crèche. Sont déjà dans cet autre possible des millions de gens, œuvrant à la fois dans le silence et avec le murmure d’un écho. Le vaisseau n’a jamais été proche de l’épave ni même fantôme. Dans l’océan céleste, les phares par milliards savent vers quel rivage Gaïa se dirige et à chaque occasion se présentant, l’aide, invisible, se crée sans autre arme que la force d’aimer. Notre époque touche à sa fin. La Nouvelle Aube est proche. Notre époque ira se fondre dans les mémoires akashiques comme un bibliothécaire range un ouvrage. Un autre s’écrit. L’oiseau ouvre un œil. Le réveil est proche. Le nouveau jour le bénit. Il se lève et s’ébroue dans une flaque de lumière. L’oiseau-Phoenix va entamer un autre pèlerinage.
M.L. 25 août 2018